(under a trillion lights).

☽ vanités

i. please introduce yourself.
J'attends de vous l’or et l’orage
Il le faut pour m’imaginer nos voyages.
Enchanté de vous connaître mon écho
caressez-moi de promesses et de beau

la clef de sol, l'assourdissement léger du 'do', la rigueur du ré et l'allégresse mélodieuse du 'fa'. Hana, elle est celle qui tourne, tourbillonne comme une hirondelle. A tire d'aile, à son rythme parfois même à une cadence que l'on ne pourrait soupçonner, l'essence de sa volonté ne se brise jamais. L'espérance pour unique totem, elle ferme les prunelles pour ne pas laisser le passé – et encore moins le futur – entraver l'instant présent. Enfant adopté, elle a su raviver la flamme d'un couple qui lui permet d'écrire à l'encre de chine la chaleur et la générosité d'un foyer. Môme authentique, môme unique en son genre, elle transpire la douceur et la bienveillance, une âme qui à l'image de l'eau coule, dessinant des ondulations à la fois tranquille, paisible et calme. Régularité de son être tel l'anneau de Saturne, elle s'épanouie avec aux éclats des lumières pour devenir une luminescence de jovialité, au delà des aléas. Seulement à l'instar d'un recto, il y a forcément un verso : une dualité qui se réveille que lorsque la panique la gagne ou encore lorsque la rancune la laisse tenace. Une amertume – presque – semi éteinte, qui sommeille encore quelques fois sous la cendre. La période de l'enfance, la ramène à l'élan d'un nouveau départ, comme un nouveau chapitre vierge qui attend de boire son encre. Tout cela à cause d'un manque de vigilance d'un chauffeur, elle a été victime d'un accident de vélo. A ce dernier, elle se voit s'en tirer sans trop de séquelles hormis une déficience partielle de l'ouïe. Absence abandonnée du bruit, les sons deviennent des souvenirs oubliés – mais pas totalement. Dès lors, sa surdité, son handicap devient le moteur pour s'apprivoiser elle-même à nouveau. Elle le gère avec beaucoup de facilité et de courage, n'empêchant aucunement son aisance à communiquer. Hana se met au défi chaque jour qui passe, se donnant les moyens de réussir et l'équation à de quoi rallumer son sourire encore un brin juvénile. Ange, elle éclaire par bien de manière l'existence par un mouvement, par un chuchotement. Hana a la passion et la détermination qui s'entremêlent pour parvenir au but. Alors pour donner du corps à son rêve de gosse, elle part pour Portland parfaire ses études et une fois le diplôme en poche se voit offrir un poste en tant qu'assistante vétérinaire. Portland n'est pas si loin et pourtant, le bercail semble la rappeler comme un poisson à la mer. La conjoncture se veut propice et le tambour du totem s'exprime de lui même. Ainsi, Silver Grove l'entraine vers un chemin à la fois emplit de sérénité et de surprises incertaines.

ii. mean streets of silver grove.
Moi je m'en moque, j'envoie valser les trucs en toc
Les cages dores, toi quand tu m'serres très fort
C'est comme un trésor et ça, et ça vaut de l'or

Née sur les terres du Pays du matin calme, elle a été bercée par les vagues de l'océan avant que l'existence décide finalement de faire échouer son bâteau. Sa voile a saisie l'opportunité de se hisser à nouveau, permettant ainsi au colibri de déployer ses ailes. Des ailes fragilisées par des bribes antérieures qu'elle combat avec une grande force intérieure. L'ouverture d'un livre neuf, prêt à se menir de son stylo pour coucher sur papier des péripéties. Adoptée à un âge où l'on songe que tout est perdu, Hana observe avec prudence et sourire le panneau de bienvenue à Silver Grove sur la route qui la mène à sa nouvelle maison. Berceau des souvenirs de l'enfance, elle n'a pas tout à fait sept années lorsqu'elle arrive au sein de la petite bourgade. Des yeux infiniement tournés vers un présent iminent, celui d'une existence à l'opposé de celle qu'elle avait connue jusqu'à maintenant. A Silver Grove, les Swartz sont connus pour être ce couple de deux personnes où le père – à peine quarantaine dépassée à l'époque – est un chirurgien dentiste auprès duquel il pleut des louanges pour son talent et dont la renommée n'est plus à faire. Quand à Calla, on la connait pour sa gentillesse et sa bienveillance auprès des jeunes enfants. Professeur des écoles, elle est cette âme dévouée à son prochain et à l'épanouissement de ses jeunes élèves. Deux parents à qui l'on souhaite de réussir tant dans leurs carrières que dans leur sphère familiale. Leur maison respire l'âme d'un foyer aimant sans l'ombre d'un enfant à l'horizon, du moins jusqu'à ce qu'un petit miracle se produise. Leur ciel s'ouvre vers une lumière chaleureuse et innocente lorsque la petite coréenne entre dans leur vie. Les Swartz souffle en hymne comme un mantra : jamais deux sans trois. Au sein de la petite ville, on apprécie les Swartz pour leurs mains tendues, les services rendus, leur humilité également. On apprend a leur contact que le plus important c'est d'être soi-même en toute tolérance prônée. De cette façon, le regard de la jeune femme sur Silver Grove n'a pas réellement changé, il demeure même plutot intact à celui de la première fois – ou presque.

iii. we're all mad here.
All i ever wanted, all i ever needeed
Is here in my arms, words are very unnecessary
Enjoy the silence

Le morceau de papier carton est accroché par une pince à linge en bois après l'un des rayons arrière de sa bicyclette. Entre eux, ils émettent un son à l'harmonie sous jacente d'un rythme qui ne cesse de trouver sa rigueur au fur et à mesure que la vitesse grandit. La tête qui dodeline de gauche à droite, elle chantonne gaiement les paroles d'une comptine étrangère. Une linguistique rêveuse et entre ses lèvres, on imagine déjà la future conteuse d'histoires et de légendes. La brise printanière vient fouetter les quelques mèches que l'on ne peut rassembler dans sa tresse. Dans son sourire, la flamme de l'existence est vivace, énergique. Elle pédale, et pédale encore avec cette dynamique de l'inscouciance qu'est la vulnérabilité. Au carrefour de la ruelle, elle s'arrête prudente de regarder autour d'elle, puis à gauche, puis à droite pour plus de sécurité. « Et c'est reparti ! ». Un élan portée au loin par le vent qui balaye en quelques secondes la chaleur d'un été tout proche. A peine deux tours de pédales poussées, que le hurlement et le klaxon d'une voiture seront les derniers bruits qu'elle entendra dans sa plus simple précision. Un accident de voiture. Il a suffit d'un manque de vigilance et d'un chauffeur abonné à l'ivresse pour que tout bascule. Au réveil, plus rien. Le trou noir, l'enfant du ciel le connaitra davantage avec la lourdeur du silence. Elle comprend sans entendre, du moins  pas réellement. Sa surdité est déclarée partielle mais ayant peu évolué avec le temps, elle a appris à faire avec. Hana ne baisse pas les bras, au contraire, elle les lève bien haut pour dépeindre le visage brillant que rien n'est un frein – à moins que l'on ne le désire. Cela fait un peu plus de quinze années qu'elle vit avec son handicap. Ce dernier, elle le comble à sa manière et le perçoit comme un vieil ami qui exprime sa liberté de s'enfuir.  La perte partielle d'un sens, ne l'empêche pas d'évoluer au quotidien et encore moins de communiquer – quand bien même elle avoue que parfois les situations sont compliquées. L'esprit vif, la lecture sur les lèvres n'est pas un souci, encore moins le langage des signes. Aussi, elle s'est créée un univers bien à elle, une bulle de savon qui ne s'est pas essoufflée – du moins par encore.

iv. something strange in the woods.
We're born with millions of little lights shining in the dark
One lights up every time you feel love in your heart

Électrokinésie. De la racine linguistique grecque à la pratique : le mouvement de l'électricité. Une étoile qui n'a jamais cherchée à briller, une constellation affichée dans au plafond du monde sans vraiment la moindre raison. La source de son don est une hypothèse logique et relative à son accident. Bien que cela remonte à quelques années, les témoins présents ce jour là et les rapports médicaux ne manqueront aucunement de mentionner les deux poteaux électriques bloquant la route. Un corps inerte au milieu de ce spectacle, ce corps étendue était le sien. L'électricité frétillait encore au bout des fils rompus brutalement par la chute. Nombreuses demeurent les déductions, elles ont tourbillonnées en boucle comme une ébullition dans sa tête, mais tout cela ne se calque que sur la logique. Cette aptitude est tangible au réel mais imprévisible à la maitrise. Ce don dit élémentaire se veut complexe car il fait appelle à la fois sur le psychisme mais aussi sur le corps. Si le contrôle corporelle prend le pli de son tempérament calme, il n'y a plus réellement sa place lorsqu'il s'agit de sa conscience. Parfois à bout, parfois éreinté, l'électrokinésie semble suivre le cheminement de ses émotions – qui dernièrement font quelques caprices. L'étonnement effraie l'enfant du cosmos, qui se voit offrir un lumière avec laquelle elle se doit de cohabiter. La plupart du temps, ce ne sont que de petits éclairs – douleur de petits coup de jus – qui s'échappent du bout de ses doigts. Quelques fois, c'est son corps tout entier qui semble la picoter et d'autrefois encore, c'est la foudre tonnant avant la pluie qui surgit lorsque la colère s'éveille. Une maitrise réservée, certes mais en perte d'équilibre bien souvent. Une incertitude de plus, qu'elle essaie de comprendre. Après tout, apprivoiser la divergence est l'un des atouts d'Hana ? Une interrogation à laquelle, elle n'a pas encore trouvé de réponse affirmée.

Une échappée belle, celle de la pile alcaline. Comme échouée sur les rivages marins, sa douceur semble s'être envolé. Une volute de fumée affamée d'anxiété, alimentée d'une colère surchargée. Elle coule, coule et s'écoule sous le flot de tes doigts qui dansent avec rapidité sur le clavier de l'ordinateur. Des reproductions visuelles pixélisées, des lignes grossières qui défilent sous tes  prunelles sans que tu ne prennes le temps de le regarder. Tu as connaissance du contenu de ses lignes, une ribambelle de mots pour exprimer ton état d'esprit actuel. Des ressentis intérieurs qui bouillonnent, oscillant entre l'émotion de l'angoisse et le pic que colérique qui n'est pas encore atteint – mais qui ne tardera pas à s'exprimer d'une manière ou d'une autre. Le sentiments est aussi fluide qu'une poussière, presque impossible à saisir comme la brise en plein assaut de chaleur. La lampe de chevet posée sur ton bureau donne à la pièce une ambiance à la fois cosy et paisible, un opposé au tourbillon qui fourmille dans ton esprit. Alors, tu continues de taper ligne après ligne, de ta mémoire à l'écrit. Un soupire sur tes lèvres rosées, les premiers tremblements commencent à apparaître dans le bout de tes doigts donnant ainsi plus d'élan – péjoratif – à ton anxiété. Cette dernière, elle ne cesse de grandir. Tu la ressens au degré de tes incertitudes, de ce stress dont s'alimente ton ire, tout cela parce que tu ne parviens pas faire preuve de tempérance. Où est-elle passée Hana ? Pourquoi, te fais-tu tant de mal pour si peu de chose ? Ta conscience est narquoise, stupidité d'une morale alors que tu fais preuve de tant de sagesse et de tolérance au quotidien. L'ampoule de la petite lampe de chevet commence à grésiller, minimisant la puissance de la luminosité. Un, deux, trois. Des crépitements s'élèvent mais tu restes sourde à ses sons. Quatre, cinq, six. L'assourdissant battement de ton cœur. Sept, huit, neuf. Tes doigts chorégraphient avec davantage de vitesse sur le clavier. Dix. Tu redoutes ce chiffre. Et, sans réellement le savoir pourquoi, l'ampoule se met à briller de chaleur avant d'exploser tandis que l'ordinateur disjoncte, te laissant plongée dans une obscurité silencieuse.