agamemnon ☽

i. please introduce yourself.
les savage c'est la famille sans histoires, sans pépins à gauche ni à droite, c'est la famille un peu artsy avec la mère qu'est fringuée comme un perroquet et le père qu'essaie de se mettre à la sculpture tous les dimanches. puis y'a le fils au milieu, celui qu'a le coeur un peu fragile, qui tangue, qui flambe, qu'aura su leur faire peur en pleine adolescence en crevant à moitié suite à une course bidonne entre lui et son chien de l'époque. arthur qui sait pas trop ce qu'il foutait et fout encore ici, qui tapait dans la gratte à défaut de taper dans les murs, que personne venait emmerder en cours, qui s'est senti pousser des ailes en carton après avoir rencontré bonnie qu'a pu que lui promettre la lune et tout le cosmos.

arthur qui laisse toujours planer sur sa face un rictus comme un genre de positivisme écoeurant qui crache des litres de sympathie. arthur qu'a le coeur quand même en vrac, qu'angoisse facilement et qui sait jamais comment se sortir de situations pétées - pour ça que y'a bonnie dans le coin qui sait faire d'une main de maître. arthur qui se serait jamais douté de l'ampleur qu'a pu prendre seven circles d'un coup. arthur toujours inspiré qui gribouille dans des carnets quelques mots, parfois barrés, parfois plus gras que les autres. arthur qu'inspire profondément, qu'est calme sans trop l'être, qu'est méfiant parce qu'il sait plus trop sur qui compter et qu'il a pas vraiment le temps pour les jérémiades de quinze minutes. arthur qu'a souvent une chemise quadrillée rouge sur les épaules, sa tignasse longue dont il sait pas se défaire et un jean délavé. arthur qu'est embrouillé, qu'est brouillon, qui fait aquarelle jeté sous la pluie qui devient une flaque aux morceaux éparpillés. lui qui se mord la langue, qui joue avec sa chevalière au pouce, qui racle le fond de sa gorge et qui sait écouter autant qu'il sait envoyer chier, qu'est expressif comme pas deux et qu'explose sans que ça prévienne.

faudrait pas abîmer le coeur tout neuf,
tout polit,
celui qu'a déjà des rayures à force de se prendre des murs.

ii. mean streets of silver grove.
ça fait pas des masses et y'a une aura presque macabre qui s'en dégage, ça fait film noir avec son lot de femmes assassinées sous la douche. c'est pas désagréable non plus, n'empêche que ça fait froncer les sourcils et qu'il percute que y'en a beaucoup qui font bestiaux à jeter dans une foire pour amuser la galerie. y'a de quoi hausser les épaules puis se figer, pas vraiment d'horreur, juste de surprise sous les lieux qu'il connaît pas encore. silver grove, il sait pas si elle va le bouffer, il sait pas si elle va faire disparaître son corps sous le plancher, en attendant il doit se la farcir avec bonnie faute de mieux.

iii. we're all mad here.
ça pulse, ça tangue contre la cage thoracique mais c'est pas à lui. c'est pas que ça a été volé, mais ça a été arraché d'un corps déjà bien clamsé. il a jamais su qui il pouvait remercier, arthur, pourtant intérieurement et à chaque boum ou bang il sait que ça suffit. muscle cardiaque défaillant, il a bien faillit y passer durant l'adolescence, à seize ans il s'est coltiné une transplantation cardiaque. opération lourde qu'aura laissé une trace conséquente sur son torse, ça fait culpabiliser parfois, ça fait sourire aussi parfois. au moins il est sûr de pas oublier qu'il en doit une bonne, et qu'une fois dans le paradis fantasmé il pourra checker le bon-samaritain qu'aura eu pitié à l'époque de sa gueule de môme pas encore totalement adulte.

iv. something strange in the woods.
il entend trop vite, il entend trop fort, ça vient comme une vague qui s'éclate sur les rochers, c'est une tempête, un tsunami un beau jour de canicule. ça lui tape contre les tympans, ça fait mélodie,
ça fait répétition,
ça fait jingle macabre d'ascenseur, ça fait

boumboum
bam bam bam
boumboumboumboum

et ça varie toujours, et ça varie sans cesse, et ça fait tourner ses veines en noeuds de marin. il entend les battements de coeur d'autrui. c'est de fond, c'est de front aussi, ça dépend des journées, des nuits aussi. ça lui fait percuter à quel point ça existe autour de lui, à quel point c'angoissant de se sentir poussé par un tamtam à deux valves.